Beninmondeinfo
CHRISTOPHE SESSOU / 27 SEPTEMBRE 2016
Un rapport d’experts onusiens du 20 septembre, a indexé le pouvoir burundais dans des violences de masse et de graves violations des droits de l’homme, commis d’avril 2015 à fin juin 2016 au Burundi. Mais en réplique, des manifestations grandeur nature ont été organisées pour protester contre le rapport. Une simple façon pour le président Nkurunziza de dresser ses partisans contre la communauté internationale.
Les rues de Bujumbura, a été très animée le weekend dernier Les rues de la capitale burundaise a été le théâtre de manifestations de milliers de Burundais parmi lesquels se trouvaient certaines hautes autorités, bien encadrés par de nombreux policiers. Ces cortèges scandaient des slogans hostiles aux Nations unies. Derrière une grosse pancarte, il était écrit en anglais : Burundi one nation, one language, genocide will never happen (« Le Burundi forme une seule nation, ne partage qu’une langue, aucun génocide ne pourra y être perpétré », ndlr). Des campagnes ont aussi été organisées sur les réseaux sociaux. En clair, Bujumbura avait fait feu de tout bois pour balayer d’un revers de main le récent rapport des enquêteurs des Nations unies sur les droits de l’homme au Burundi. Et pour cause, la publication d’un rapport le 20 septembre par des enquêteurs des Nations unies accusant le gouvernement d’être responsable de graves violations des droits de l’homme et mettant en garde contre la possibilité d’un génocide. Quant au président Pierre Nkurunziza, il n’est pas du reste. Il s’est fendu d’une quarantaine de tweets ce samedi pour critiquer les Nations unies et défendre son action à la tête de l’État. Presque au même moment, les internautes ont eu droit à la quarantaine de tweets du chef de l’État. « Nous leur [l’ONU, ndlr] avons expliqué de façon rationnelle, légalement, socialement, humainement, qu’il n’y aura jamais plus (sic) de génocide au Burundi… Pourtant ils reviennent avec la même pancarte : « Génocide au Burundi ». Surtout quand c’est le moment des grandes rencontres internationales », a-t-il lancé dans deux tweets qui se succèdent après avoir rappelé que « la vérité triomphe, même seul face au monde ». « Nous leur avons expliqué de façon rationnelle, légalement, socialement, humainement, qu’il n’y aura jamais plus de génocide au Burundi. Pourtant, ils reviennent avec la même pancarte: « Génocide au Burundi. Surtout quand c’est le moment de grandes rencontres internationales » Pour sa part , Thérence Ntahiraja, assistant du ministre de l’Intérieur, a tenu un discours similaire devant les manifestants : « ces enquêteurs ont rassemblé uniquement les témoignages de l’opposition radicale. Le rapport ne contient rien sur les jeunes qui se sont désolidarisés des malfaiteurs. Ce n’est que du mensonge… Nous demandons aux Nations unies de ne pas prendre en compte ce rapport ».
Nkurunziza fait d’une pierre deux coups
Le président burundais est plus en plus isolé au plan international depuis sa décision de modifier la constitution en avril 2015 pour briguer un troisième mandat. La crise politique et sécuritaire qui en est découlée ont fait 400 morts et plus de 300 mille de déplacés. De hauts responsables burundais ont été mis en cause comme l’indique le document de 33 pages. Le rapport est venu confirmer les soupçons de la communauté internationale depuis le début de la crise. A court d’arguments pour exhiber quelque innocence aux yeux de la communauté internationale, l’homme fort de Bujumbura a voulu faire d’une pierre deux coups. Il s’agit dans un premier temps de montrer au monde entier qu’il a sa population derrière lui. Qu’elles aient été achetées pour marcher ou que ce soit sous la menace des armes, là n’est pas la question. Le président burundais voulait avoir sa population dans les rues de Bujumbura par milliers en signe de protestation contre le rapport onusien. Il n’en est pas resté là. Le numéro 1 des burundais a tenu aussi à abreuver les « marcheurs du weekend » avec des messages hostiles à la communauté internationale. Et pour atteindre le plus grand nombre de ses concitoyens, le président Nkurunziza a choisi à dessein les réseaux sociaux. Concomitamment, ses faucons ont livré des messages peu indiqués à l’endroit des Nations unies. Une façon bien subtile de dresser sa population contre le monde entier
Il est à rappeler que le dictateur burundais n’est pas à son premier forfait en matière d’organisation de marche de défiance contre tous ceux qui ne regardent pas dans le même sens que lui. Il y a encore quelques huit semaines, de telles marches ont été organisées devant l’ambassade de la France à Bujumbura. Il s’agissait de protester contre une résolution onusienne soutenue par la France, autorisant envoi de 228 policiers onusiens au Burundi. Leur mission était de « surveiller la situation en matière de sécurité », ainsi que le respect des droits de l’Homme, en coordination avec quelques dizaines d’observateurs et d’experts militaires de l’Union africaine déjà déployés. Le locataire du palais présidentiel de Bujumbura craignait au fait que les nombreuses exactions dont son entourage et la milice des imbonerakure à sa solde, soient découvertes par la force de police onusienne. Il convient de souligner que les violations massives des droits de l’homme sont tellement légions au Burundi que la 33ème session des droits de l’homme de ce 26 septembre, a décidé de se pencher sur la situation dans ce pays.
Christophe SESSOU
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